mercredi 25 décembre 2013

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Benj Pasek et Justin Paul forment un talentueux duo d'auteurs-compositeurs. A 28 ans à peine, ils ont déjà vu leurs musicals joués off-Broadway (Dogfight) et à Broadway (A Christmas Story). Pour ce dernier, ils ont été nommés aux Tony Awards. Le spectacle se joue actuellement à New York pour la saison des fêtes dans le gigantesque Madison Square Garden. Enfin, le duo a également écrit des chansons pour la série SMASH produite par Steven Spielberg. Nous les avons rencontrés lors de leurs master classes à Paris avec AMT Live.


Benj Pasek & Justin Paul (c) DR
Benj Pasek & Justin Paul (c) DR
Benj Pasek et Justin Paul, comment vous êtes-vous rencontrés ?
Justin Paul
 : Nous avons tous les deux étudié le théâtre musical à l’Université du Michigan dans l’intention de devenir acteurs : on prenait donc des cours, de chant, de théâtre et de danse, et on est devenus de bons amis principalement grâce aux cours de danse classique… Nous étions les deux pires élèves du cours. On sa cachait l’un l’autre pour se protéger !
Benj Pasek : On n’arrivait pas à se souvenir de vos termes français : pirouettes, pas de chat, c’était vraiment compliqué ! Alors on se contentait de courir puis de sauter : on est devenu amis comme ça ! Plus tard, j’avais écrit quelques chansons, je voulais que Justin m’aide à les améliorer et qu’il joue du piano sur un CD pop que je pensais faire. On s’est mis dans une pièce pour travailler une chanson, et on a été incapables de se concentrer mais c’est comme ça qu’on a a commencé à collaborer ensemble. En deuxième année, on a été pris pour de très mauvais rôles dans la production de la fac de City of Angels. J’ai été casté dans le rôle du « photographe », à savoir que pendant deux heures et demie, je traversais la scène et je prenais des photos. Justin a été pris dans le rôle du « danseur asiatique » et comme vous pouvez le voir, il n’a pas grand chose d’un danseur asiatique ! Alors on a décidé d’écrire notre propre spectacle et on a écrit la première version de Edges.
Dès le début, vous avez tous les deux travaillé conjointement à la musique et aux paroles ?
BP
 : Oui, Justin travaille un peu plus sur la musique et moi sur les lyrics, mais nous collaborons ensemble sur les deux aspects. Notre philosophie, c’est que l’on essaie de se pousser l’un l’autre pour faire de notre mieux possible car la la chanson est un tout. Et on ne peut plus séparer la musique et le texte une fois qu’ils sont réunis.
Votre première collaboration a été sur le « song cycle » Edges, pouvez-vous nous en parler ?
JP
 : Ces chansons étaient basées sur des gens qu’on connaissait ou sur des expériences qu’on avait vécues : des jeunes gens avec des grands rêves et des désirs, des jeunes en couple, des réflexions que l’on peut avoir quand on a une vingtaine d’années. A l’université, on n’a pas étudié l’écriture mais l’interprétation en tant que comédien, on a donc utilisé ce qu’on avait appris dans nos chansons : quel est le personnage ? Quel est son objectif ? Quelle est sa stratégie, etc ? Nous avons abordé les choses à l’envers en quelque sorte.
Ci-dessous, Benj Pasek, Justin Paul & Shoshana Bean chantent « Like Breathing » de Edges :
Edges a commencé à se répandre très vite…
BP
 : On eu la chance que le spectacle commence en 2005 à l’époque où Youtube et Facebook devenaient très populaires. C’est un des premiers shows à avoir été mis en ligne et ça s’est répandu de façon virale. Avant, on jouait à New York, et on avait des critiques new-yorkais qui écrivaient leur article pour que le reste du monde sache de quoi il retourne. Aujourd’hui, quand on met une chanson sur Youtube, le monde entier peut la voir et s’y intéresser. Quant à Facebook, à l’époque, il était surtout utilisé par les étudiants et on pouvait trouver ceux qui étudiaient aussi le théâtre musical et communiquer avec eux. Ils ont commencé à nous poser des questions sur le spectacle et ça a été très facile de partager avec eux les informations. En moins d’un an, Edges a été joué dans douze universités et de là, il a commencé à se répandre. Des étudiants, il est passé aux jeunes professionnels, puis aux moins jeunes.
JP : Après Edges, on a travaillé sur trois projets en même temps : James and The Giant Peach, A Christmas Story et Dogfight. Les shows prennent du temps, ca ne se passe pas en une nuit : on écrit une version, on fait un workshop, on écrit une nouvelle version, etc. Comme nous n’avions jamais écrit de musicals avec un livret (Edges étant un song cycle), avoir trois projets en même temps était bon pour la pratique.
Comment avez-vous réagi quand vous avez appris que A Christmas Story allait se monter à Broadway ?
BP
 : C’était assez dingue. Aucun de nous ne s’attendait à ça, on a créé le spectacle à Seattle et on s’estimait déjà très heureux qu’ils souhaitent le développer pour une tournée américaine. Mais on ne pensait pas avoir de bonnes critiques, à cause du fait qu’il soit adapté d’un film très populaire, les critiques sont souvent durs avec ça et pensent que les films populaires sont adaptés en comédies musicales pour des raisons purement commerciales. Nous, on a voulu être le plus sincère possible dans notre approche. Et quand on a appris que A Christmas Story allait se jouer à Broadway, c’était un rêve qui se réalisait.
Ci-dessous, A Christmas Story aux Tony Awards 2013.
Puis la nomination aux Tony Awards…
BP
 : Encore une fois, on ne s’attendait pas à un tel honneur. Honnêtement, c’était surréaliste et à ce jour, on a encore du mal à croire que c’est vrai. Comme tous les ans, on a regardé l’annonce des nominations à la télévision et quand on entendu nos noms, c’était une expérience exceptionnelle.
JP : Et aujourd’hui, le spectacle passe d’une salle de 1500 places à 5000, au Madison Square Garden. Comme c’est un spectacle de saison, il peut revenir plusieurs années de suite.
Off-Broadway, vous avez créé Dogfight en 2012. Adapté d’un film dont l’action se situe dans les années 60, le spectacle vous a permis d’explorer un autre registre musical ?
JP
 : Absolument, A Christmas Story s’inscrivait dans un registre classique dans le style de Broadway des années 40 principalement, James and The Giant Peach était plus du fun familial et Edges était plus contemporain. Pour Dogfight, on voulait garder un aspect contemporain mais à travers un filtre sixties, légèrement « folk ». On aime aller d’un style à l’autre et c’était intéressant de travailler cette partition dans cette direction.
Vous avez également composé des chansons pour la série SMASH, parlez-nous de cette expérience.
BP
 : Un nouvel intervenant a pris en main la production de la deuxième saison et nous sommes allés dîner avec lui. Au départ, c’était pour nous poser des questions sur notre façon de travailler car il y avait deux nouveaux personnages : un duo d’auteurs-compositeurs. Nous, notre rêve, c’était qu’il nous propose d’écrire des chansons pour la série. Ca s’est produit un mois après ce dîner. Notre première chanson a été diffusée dans le deuxième épisode. C’était une expérience passionnante, d’autant plus que NBC, la chaîne qui diffusait la série, est une des plus importantes aux Etats-Unis.
Ci dessous, « Caught In The Storm » de Pasek & Paul, pour SMASH.
Quels sont vos projets aujourd’hui ?
JP :
 On a quelques musicals en projet : l’un d’eux est entièrement original, basé sur une idée qu’on a eue, et sera mis en scène par Michael Greif (Next To Normal, Rent). Ca prend du temps à se développer. Et on travaille également sur un autre projet avec Rick Elice qui a écrit Peter and The Starcatcher et Jersey Boys.
Pour conclure, quels seraient vos conseils aux jeunes gens qui souhaitent travailler dans le théâtre musical, qu’ils soient comédiens ou auteurs ?
BP
 : Je pense que nous avons eu beaucoup de chance de commencer à écrire au moment où Internet pouvait être un outil. Il ne faut pas non plus tomber dans le piège d’écrire uniquement pour Internet au lieu d’écrire des musicals. Il faut trouver un équilibre et utiliser ce support intelligemment. Si vous avez une idée : faites-le. Aujourd’hui, tout le monde peut créer quelque chose et le montrer. Et si c’est mauvais, continuez jusqu’à ce que ça soit bon et que vous en soyez fiers.
JP : Pour finir, je dirais que nous avons étudié pour être comédiens et nous sommes désormais auteurs-compositeurs. Certaines personnes peuvent se sentir bloqués par leurs propres objectifs en se disant : je veux être comédien et point barre. Mais on peut trouver la bonne voie en cours de chemin. Il faut être prêt à suivre son cœur pour découvrir quelle est notre vocation réelle.

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